Un changement complet de perspective
Dans un document datant de 2010, l’OMS établit des « Standards pour l’éducation sexuelle en Europe »1, dont l’application se fait de plus en plus pesante ces derniers temps. »L’éducation sexuelle signifie l’apprentissage des aspects cognitifs, émotionnels, sociaux, interactifs et physiques de la sexualité. » « L’éducation sexuelle doit être un processus permanent tout au long de la vie. » À elles seules, ces deux phrases résument peut-être toute la logique et le projet de l’OMS.
Il s’agit de passer d’une approche de politique préventive de santé publique (prévenir maladies et abus) à une éducation sexuelle holistique (le mot est de l’OMS), qui tend, excusez du peu, à la définition des conditions même de l’épanouissement de l’être humain. Et donc vers une approche prescriptive qui évoluera nécessairement vers une forme de coercition : si l’on sait, « scientifiquement », ce qui est bon pour vous, quelle raison avez-vous de vous y opposer ? Il est alors légitime de vous l’imposer : ce qui est bon pour vous est bon pour la société, et se traduit par une consommation optimisée de ressources.
Responsabilité, conformité, rentabilité : peut-être la nouvelle devise de notre république… toute ressemblance avec une certaine crise sanitaire récente serait purement fortuite !
La sexualisation de l’enfant : des affirmations choquantes diluées dans un ensemble de considérations banales
La technique est éprouvée qui consiste à rendre acceptable une idée nouvelle en la juxtaposant avec des idées déjà largement acceptées. Un consentement subtilisé, en quelque sorte, un comble pour un document qui affiche comme objectif la protection des enfants contre les abus.
Ainsi, pour les enfants de 2 à 3 ans, il est habilement glissé au titre de la curiosité et de la découverte de son corps, qu’ils « commencent à délibérément toucher leurs parties génitales parce que cela leur fait du bien ».
Il ne faut pas chercher longtemps pour retrouver la notion de « plaisir et la satisfaction liés au toucher de son propre corps, la masturbation enfantine précoce », vous avez bien lu, et il suffit d’explorer un peu les références du document pour trouver très rapidement des auteurs faisant référence à des « orgasmes à partir de 4 mois », d’après les travaux fallacieux d’Alfred Kinsey, mégalomane, mythomane et fraudeur scientifique, mais toujours révéré comme un pionnier dans l’étude de la sexualité.
Le point le plus choquant est peut-être l’affirmation péremptoire que « le développement des comportements, sentiments et capacités cognitives en matière de sexualité débute in utero », et a fortiori dès la naissance.
Conclusion pratique de ce document : Votre enfant est à nous dès la naissance, mais nous accepterons à la rigueur de le partager avec vous si vous vous pliez à notre projet.
L’être humain unidimensionnel
Autre élément frappant, récurrent depuis quelques années : la dérive vers le syndrome de l’expertise en délégitimant des autres sources d’information « qui ne disposent souvent pas elles-mêmes des connaissances requises ». Comprendre que même si on ne peut pas (encore) vous en empêcher, vous n’êtes plus vraiment apte à parler de sexualité avec votre enfant.
Les individus ont des compétences et des ressources. Une uniformisation, un aplatissement de la complexité, de la profondeur et de la subtilité de l’humain vers une vision compartimentale, avec des entrées, des sorties, des stimuli et des réponses. Ou comment la recherche du bonheur de l’humanité dérive lentement vers une hubris dystopique à bas bruit, qui sera fort heureusement intenable. Quand tout cela s’écroulera-t-il ? Personne ne peut le prédire, et cela ne se fera sans doute pas sans dégâts.
En attendant il nous reste à préserver et transmettre une vision à la fois riche et humble de l’être humain. Une humilité, issue de la conscience de nos limitations et faiblesses intrinsèques, qui nous permet justement de nous ouvrir aux autres et au monde, de cheminer et de nous enrichir.
T.B.