Plus qu’un drame, une tragédie où tout était joué d’avance. Un père absent délinquant, une mère probablement dépassée, un adolescent sans repères et sans limites, qui les a cherchées jusqu’à l’acte ultime qui lui a ôté la vie. Après le dénouement fatal, nous restent l’incrédulité, la spéculation, la polémique. Le policier aurait-il dû tirer dans les pneus ? Sans doute. Mais quelle est la formation des policiers aux situations d’urgence ? L’équipement ? la charge de travail ? Autant de questions qui ne sont pas posées.
Et l’occasion était trop belle d’obliger chacun à choisir son camp. Pour ou contre la police ? Pour ou contre les « quartiers » ? Enfin chacun allait savoir qui est l’ennemi. Et c’est à coup de cagnottes que l’on s’est affronté. Pour cette fois. Une écœurante compétition victimaire, de part et d’autre, à des lieues des vrais enjeux soulevés autant par cette tragédie que par l’ampleur de ses conséquences. Et pourtant ce tragique fait divers condense à lui tout seul pratiquement tous les maux de notre société : perte des repères, recul du sens de l’appartenance à une collectivité, déliquescence de l’éducation ; et ses inévitables corollaires : refus de l’autorité, délinquance, tribalisme.
Une nation n’est pas une start-up. Ce contre-sens idiot – mais probablement pas involontaire – joue sans doute une bonne part dans cette difficulté croissante des individus, instruits ou non, éduqués ou non, à vivre en société. Est-il si compliqué d’imaginer que la dynamique d’un groupe humain puisse être spécifique d’un lieu, d’un temps, d’une histoire ? Une société n’est pas une juxtaposition d’individus atomisés, mais le tissu formé par leurs relations. Encore faut-il les construire par l’éducation et les entretenir par une vie civique. Voilà un bon thème de réflexion pour un 14 juillet.
T.B.